Construire plus d’éolien en France ne servirait qu’à faire augmenter les émissions de CO2 et le coût de production de l’électricité

B.Durand

Le développement de l’électricité éolienne voulu par notre gouvernement entraînerait une charge financière de plus en plus insupportable pour les consommateurs et les contribuables français alors qu’il est parfaitement inutile. Il aurait aussi pour effet indirect une augmentation des émissions de CO2 de notre production électrique, et contribuerait donc à la détérioration du climat.

Démonstration :

1-Un réseau électrique n’est stable que si la puissance électrique produite par l’ensemble des centrales électriques qui l’alimentent (= le «mix électrique ») est égale à chaque instant et en tous lieux à la puissance électrique demandée par les consommateurs et si en même temps la fréquence du courant est maintenue constante à 50 Hertz, toutes deux à 1% près sous peine de blackout. En raison du caractère extrêmement variable et incontrôlable de la puissance électrique qu’elle produit, qui dépend de la météo et non de la volonté humaine, mais aussi de son inaptitude à maintenir la fréquence du réseau, l’électricité éolienne injectée sur un réseau est incapable d’y remplir à elle seule ces conditions impératives de puissance et de fréquence. Il est donc impossible de créer un réseau électrique n’utilisant que des éoliennes comme génératrices d’électricité (il en est de même des panneaux solaires). A cause de cette forte et incessante variabilité, un particulier qui voudrait n’utiliser que de l’électricité éolienne en prise directe en sortie d’éolienne ne le pourrait pas non plus.

Tant que nos élus et nos dirigeants n’auront pas une fois pour toutes réalisé ces évidences, ni compris leurs conséquences, ceux-ci n’arriveront pas vraiment à comprendre la nature des problèmes posés par le développement de l’électricité éolienne dans notre pays et ne pourront pas non plus définir sur des bases rationnelles la politique à y mener en matière d’électricité.

2– Pour utiliser l’électricité éolienne (ou solaire PV), deux méthodes sont cependant possibles :

a- La coupler sur le réseau à de l’électricité produite par des centrales dites « pilotables » parce que celles-ci peuvent produire à la demande du consommateur.

Ces centrales pilotables ajustent en permanence dans cette limite de 1% la puissance de la production à la puissance de la consommation et la fréquence du courant à 50 hertz. C’est ce qu’on appelle faire du « suivi de charge ». En France ce sont des centrales nucléaires, des centrales hydroélectriques de lac de barrage et quelques centrales à gaz et à charbon, en Allemagne essentiellement des centrales à charbon et à gaz. Le suivi de charge de ce « mix électrique » fait de centrales pilotables et d’éoliennes (et maintenant de panneaux solaires) est un jeu à somme constante :pour une consommation donnée, les centrales pilotables, pour faire place à cette production aléatoire d’électricité de puissance incessamment et très fortement variable qui leur est imposée, doivent diminuer d’autant, et de façon tout aussi aléatoire, leur puissance de production d’électricité. Ce sont elles et non pas l’éolien ou le solaire PV qui assurent la majeure partie de la consommation demandée. Or elles pourraient à elles seules produire la totalité de cette consommation, si les éoliennes ne leur étaient pas imposées.

Il est donc impossible de rendre autonome électriquement un territoire rural ou une bourgade avec uniquement des parcs éoliens (et solaires PV). L’électricité que ceux-ci produisent est en réalité « refoulée » sur le réseau de transport d’électricité qui achemine ensuite vers tous les consommateurs français et même européens en fonction de la demande le « mix électrique » fait des productions de l’ensemble des centrales électriques branchées sur le réseau. L’éolien, ou le solaire PV, n’en représente qu’une partie qui est forcément minoritaire pour préserver la stabilité du réseau.

Il résulte de cette association forcée que l’on utilise plus de moyens de production pour produire la même quantité d’électricité. Le coût de production de l’électricité produit par ce « mix » de production électrique est donc automatiquement plus élevé par kWh produit que celui d’une électricité qui serait produite par les centrales pilotables nécessaires seules. Cela d’autant plus qu’il faut aussi de coûteuses transformations du réseau électrique pour que ce système puisse fonctionner, et que les centrales pilotables, devant diminuer leur production pour un même investissement et des charges inchangées (salaires, maintenance, frais financiers…), voient inexorablement le coût de production de leur électricité augmenter.

Les élus locaux qui encouragent la création de parcs éoliens ( ou solaires PV) dans leur commune pour boucler les fins de mois grâce aux redevances et aux subventions qui les accompagnent, non contents de laisser s’altérer gravement leur environnement proche et de créer des dissensions durables chez les habitants,  ne réalisent sans doute pas, ni encore pour l’instant leurs électeurs, qu’ils contribuent ainsi à faire augmenter lentement mais inexorablement le coût technique de production du mix électrique et donc le prix de l’électricité* pour ces électeurs.

C’est environ 20 milliards d’euros qui en 2021 ont été sous une forme ou sous une autre prélevés sur l’économie française, c’est-à-dire in fine sur les contribuables et les consommateurs, pour développer l’éolien (et le solaire PV) en France. Ces dépenses pourtant inutiles pour la collectivité dans son ensemble doubleront ou tripleront dans les années qui viennent si les plans actuels du gouvernement de développement de l’éolien (et du solaire PV) se concrétisent**. A noter que les matériels utilisés ne seront même pas produits en France, mais très probablement en Chine !

b-Utiliser des stockages d’électricité qui joueront alors le rôle des centrales pilotables en faisant du suivi de charge cette fois par stockage-déstockage d’électricité.

   Mais cette méthode n’est envisageable que pour de petites consommations d’électricité, les capacités des systèmes de stockage-déstockage actuels n’étant pas à la mesure des quantités d’électricité produites à l’échelle d’un pays***. Un ménage ou une petite entreprise, à la rigueur une petite commune rurale, peut l’envisager pour se rendre autonome en électricité et ainsi pouvoir se couper du réseau. Mais il faudra pour cela faire un double investissement :  les éoliennes (ou les panneaux PV) et le stockage d’électricité, qui peut être à ce faible niveau de consommation être un pack de grosses batteries. Il faudra y ajouter un système électronique de gestion automatique. Les frais de maintenance, faute de savoir-faire des populations concernées, et les risques de panne seront élevés. C’est en fait un jeu très coûteux et risqué pour un particulier ou une commune. Il n’en vaut pas la chandelle, sauf là où il est trop coûteux d’amener le réseau électrique jusqu’à ce particulier ou cette commune (fermes australiennes par exemple). A moins bien sûr d’être subventionné comme c’est le cas actuellement en France par le gouvernement, c’est-à-dire par nous les contribuables et les consommateurs.

3-L’éolien ( le solaire PV) ne permet pas à l’échelle d’un pays de se passer de centrales pilotables.

   La puissance maximale de la consommation d’électricité (= la « pointe » annuelle de la consommation) a lieu en France en hiver pendant la nuit, et coïncide souvent avec la présence de puissants anticyclones entraînant l’absence quasi-totale de vent sur l’Europe de l’Ouest pendant des périodes pouvant aller jusqu’à 15 jours. Les centrales pilotables doivent alors pouvoir produire au pied levé la puissance électrique que ne peut plus fournir l’éolien (ni le solaire PV). Pour cela leur puissance totale installée doit être au moins égale à cette de la puissance de pointe de la consommation plus une bonne marge de sécurité pour garantir la disponibilité de la puissance nécessaire lors de cette pointe.

Construire à grands frais des dizaines de milliers d’éoliennes et de panneaux solaires comme a décidé de le faire notre gouvernement ne changera rien à cette situation : pas de vent= pas d’électricité éolienne, pas de soleil = pas d’électricité photovoltaïque.

Les promoteurs communiquent uniquement sur les quantités d’électricité produites et se gardent bien de parler des énormes variations de la puissance électrique fournie et l’impossibilité de produire cette électricité sans l’associer avec la production de centrales pilotables.

En fait l’éolien (le solaire PV) ne permet pas de supprimer de centrales pilotables. Il les « cannibalise », en les empêchant de produire une électricité qu’elles pourraient parfaitement produire à elles seules, ce qui a pour résultat de diminuer leur rentabilité, mais aussi, en leur imposant un régime de fonctionnement variant sans cesse de façon aléatoire, de provoquer un mauvais rendement et une usure prématurée et dangereuse du matériel.

Le choix n’est donc pas entre éolien (ou solaire PV) et centrales pilotables comme les promoteurs de l’éolien (et malheureusement aussi nos dirigeants, nos médias et beaucoup d’élus) s’ingénient en permanence à nous le faire croire (pourquoi ?), mais entre différentes catégories de centrales pilotables pour assister l’éolien (et le solaire PV).

   Dans le cas de la France, ces centrales pilotables sont essentiellement des centrales nucléaires et des centrales hydroélectrique de lacs. Il y a aussi quelques centrales à gaz et turbines à fuel ou à gaz et très peu de centrales à charbon. En Allemagne, ces centrales pilotables sont essentiellement des centrales à charbon et à gaz, et des turbines à fuel ou à gaz.

Fermer des centrales nucléaires, comme notre gouvernement a commencé à le faire avec Fessenheim, nous conduira donc inexorablement à construire des centrales à charbon et à gaz comme en utilise l’Allemagne pour remplacer la puissance perdue, avec comme conséquences :

-D’augmenter les émissions de CO2 de notre production d’électricité, actuellement les plus faibles par kWh produit de tous les grands pays industrialisés parce que l’essentiel de notre électricité est encore produit par des centrales nucléaires et hydroélectriques. Contrairement à ce qu’essayent sans cesse aussi de nous faire croire les promoteurs de l’éolien, les médias, notre gouvernement et beaucoup de nos élus, le développement de l’éolien (et du solaire PV) n’est donc pas en France l’ami du climat, mais son ennemi.

-D’importer du charbon et du gaz car nous n’en avons plus, créant ainsi une dépendance énergétique des pays producteurs, avec les risques géopolitiques considérables que cela implique, comme le montre actuellement la guerre en Ukraine.

 Pourquoi donc alors s’obstiner à développer un système qui détruit inexorablement notre environnement et notre biodiversité, gâche notre patrimoine architectural et paysager, ne peut que faire augmenter à terme bref les émissions de CO2 de notre production d’électricité, mine notre économie, coûte en réalité très cher directement et indirectement au consommateur-contribuable, crée des risques géopolitiques considérables et qui en définitive ne sert à rien pour la collectivité française ?

La grande majorité de nos élus et de nos dirigeants, à tous niveaux », fait preuve depuis 30 ans d’une très grande légèreté dans la conduite de notre politique énergétique****, au détriment de la collectivité nationale, sans doute faute d’avoir bien compris tout cela. La plupart de nos médias, y compris publics, leur ont emboîté le pas. Combien de temps encore faudra-t-il les supplier de faire l’effort de bien s’informer pour bien comprendre, puis de correctement informer nos concitoyens, pour ne pas conduire, par un développement inconsidéré de l’éolien (et du solaire PV), notre pays dans une nouvelle impasse.

* Le prix de l’électricité est à bien distinguer de son coût technique de production. Il est forcément supérieur à ce dernier et même très largement du fait des nombreuses taxes qui s’y superposent. Mais comme il se détermine sur le marché européen de l’électricité, il a aussi un caractère spéculatif, comme l’ont montré les spectaculaires hausses de prix pour les consommateurs qui viennent de se produire.

**M.Villey-Migraine et B.Durand, 2023 : « L’éolien en question :treize démentis sur l’intérêt de construire des parcs éoliens maritimes et terrestres en France ». Editions le Lys Bleu. Démenti n°4.

***On parle beaucoup à ce sujet de la méthode power-to-power (P2P) qui consiste à produire de l’hydrogène électrolytique avec l’électricité éolienne (ou solaire PV), le stocker quand cette électricité est en excès par rapport à la consommation, afin quand elle est en défaut de pouvoir produire de l’électricité avec une pile à combustible ou une turbine à hydrogène et de cette façon ajuster la production à la consommation. Malheureusement le rendement de ce procédé n’est que de l’ordre de 25 %, ce qui signifie qu’il faudrait alors multiplier par quatre le nombre d’éoliennes pour produire la même quantité d’électricité. Il faut aussi se rappeler que l’hydrogène peut être un explosif très puissant. Aucun pays n’a pour l’instant mis en œuvre ce procédé, ni même cherché à le faire, à l’échelle qui serait nécessaire. Malgré 50 ans maintenant de recherche intensive, aucun procédé de stockage de l’électricité à très grande échelle n’a en fait jusqu’à présent été découvert.

**** voir https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/organes/autres-commissions/commissions-enquete/ce-independance-energetique

+Ingénieur, chercheur et naturaliste, ancien président du Comité scientifique de l’European Association of Geoscientists and Engineers.

                                                                    Annexe

Les promoteurs communiquent uniquement sur les quantités d’électricité produites par les parcs éoliens et se gardent surtout bien de parler des énormes variations de la puissance électrique fournie, qui rend pourtant indispensable son couplage avec de la puissance produite par des centrales pilotables. Un exemple de l’énorme variabilité et du caractère aléatoire de la puissance électrique produite par un parc éolien en mer* est celui des parcs du Banc de Guérande près de Saint-Nazaire, figuré ci-dessous.

Profil en MW de la puissance électrique fournie pendant le premier semestre de l’année 2023 par les parcs éoliens dits « du Banc de Guérande » près de Saint Nazaire. On remarque la stupéfiante variabilité et le caractère aléatoire de cette puissance, qui rendent l’électricité produite par ce parc (comme pour tous les autres parcs éoliens) totalement inutilisable pour un consommateur sans «mixage» avec de la puissance électrique fournie par des centrales pilotables. Il en serait de même des parcs prévus à Oléron. Les promoteurs, notre gouvernement, les médias et les commissions de « débat public ») se gardent bien de publier de tels profils malgré les demandes, comme on a pu le constater lors du débat public organisé par la CNDP sur Oléron, car cela ruinerait leur politique de désinformation incessante sur ces sujets.

*Pour se rendre compte de l‘ampleur également considérable mais un peu moindre des variations de l’éolien terrestre voir le site https://www.energethique.com/articles.php?lng=fr&pg=584&tconfig=3